Que l'on appelle cette pratique éducation positive, bienveillante, ou toute autre dénomination, nous sommes nombreuses (et nombreux) à vouloir élever nos enfants dans un climat de douceur et de bienveillance. Mais ce type d'éducation peut nous causer des tracas, du stress, de la culpabilité... Comment allier la sécurité émotionnelle de nos enfants et notre propre préservation mentale ?
Quelles sont nos préoccupations pour nos enfants?
De nos jours, nous sommes très concernées par le bien-être de nos enfants : les faire grandir dans la communication, le respect, leur donner de l'autonomie, un esprit d'ouverture...
Globalement, l'idée est de donner à l'enfant :
- La confiance en soi
- La conscience de ses capacités et de ses limites
- La certitude qu'il ou elle peut tout nous dire, y compris des aveux pas très glorieux
Cela implique énormément d'actions de notre part en tant que parents :
- encourager plutôt que punir
- célébrer toutes les tentatives, même échouées, et pas uniquement les résultats et objectifs atteints
- laisser le temps aux enfants d'acquérir chaque compétence à leur rythme
- garder son calme en toute circonstance
- accorder des temps d'écoute disponible et active à nos enfants
Et plus généralement, notre préoccupation première est de ne pas traumatiser nos enfants.
Ne pas faire d'enfant roi
Se rajoute à toutes cette charge mentale l'idée (plutôt pertinente tant qu'elle n'est pas une injonction culpabilisante) à ne pas laisser l'enfant faire sa loi à la maison. Ne serait-ce que pour lui permettre de s'adapter à notre monde rempli d'interdits et d'obligations.
Bienveillance ne veut pas dire absence de cadre ou de contraintes. L'idée est de donner des limites aux enfants tout en privilégiant la communication, le "Pourquoi c'est une limite" et orienter l'attention vers un espace de liberté (relative), plutôt que les brimades et les reproches.
Exemple : il est interdit de rentrer dans la cuisine
Plutôt que d'opter pour la stricte interdiction, "parce que c'est comme ça", et les punitions si cette règle est transgressée, on peut envisager :
- d'expliquer pourquoi c'est interdit : c'est dangereux, il y a des instruments très chauds, des ustensiles qui peuvent blesser...
- de proposer un autre espace de liberté : et si tu jouais à faire la cuisine avec ta dînette dans ta chambre ?
- de célébrer avec emphase quand la limite est respectée : bravo !
- et pourquoi pas de proposer des dérogations ponctuelles : tu peux venir avec moi dans la cuisine pour rincer ton gobelet / faisons un gâteau ensemble ...
Pourquoi cela nous épuise ?
Il en faut, de l'énergie, pour rester zen, dispo et patiente en toute circonstance ! Parfois cela fait partie de notre personnalité, parfois cela nous demande des efforts. Et dans tous les cas, comme nous ne sommes pas des robots, il nous arrive de faire des erreurs, de craquer : on s'énerve, on presse l'enfant, on n'est pas prête à l'écouter, on lui crie dessus... et puis on culpabilise, on pense qu'on aurait dû faire autrement, on a l'impression d'être une mauvaise mère... alors que l'on est juste un être humain !
Alors comment concilier notre envie de bien faire et la réalité du quotidien ?
C'est l'intention qui compte
En tout cas, au début, le plus important est d'avoir la conscience du cadre bienveillant que l'on veut donner à notre enfant, et de ce qu'il convient de faire ou ne pas faire pour s'en tenir à cette bienveillance.
Ainsi, même inconsciemment, on va tendre vers ce comportement d'écoute, d'attention, de positivité.
C'est important car c'est la base. Notre enfant va sentir notre comportement qui, de manière générale, est dans cette mouvance. Et cela permet aussi de relativiser lorsque l'on craque et que l'on perd son calme : une punition, une dispute, ce n'est rien par rapport à tout un climat de douceur.
Dissocier le fond et la forme
Parfois, on est bien embêtée, parce que l'enfant refuse nos contraintes, s'énerve, nous colle la honte en public parfois. Et dans ce cas, la bienveillance a elle aussi ses limites.
Dans ce cas, l'astuce n°1 est de dire clairement à l'enfant les mots qui nous brûlent les lèvres (et qui ne sont pas forcément positifs) tout en gardant une attitude calme et posée.
Attention tout de même à ne pas faire de reproches avec le verbe être ("tu es pénible", "tu es insupportable") mais à parler uniquement de comportement, d'action, d'attitude. Et surtout ne pas faire de généralité du type "Tu ne fais jamais..." mais parler uniquement de la situation présente.
Par exemple, quand l'enfant fait une crise en refusant une contrainte que l'on lui impose : dire avec une voix calme et en faisant un câlin (si possible) : Ton comportement est inadmissible, je suis fâchée. etc.
Je vous l'accorde, c'est difficile de garder une attitude posée, mais cela fait vraiment du bien de mettre des mots sur nos propres ressentis : la colère, le fait que l'on ne tolère pas ce comportement, entre autres. Et cela met les choses au clair dans l'esprit de l'enfant, tout en conservant une atmosphère douce.
Il est par ailleurs utile d'avoir à peu près la même discussion avec l'enfant à froid, une fois le calme retrouvé. Car en pleine crise, l'enfant n'aura peut-être pas complètement intégré ce que vous lui avez dit. Et aussi pour permettre à l'enfant d'expliquer ce qui lui a déplu dans la contrainte.
Personnellement, cette façon de faire m'a permis d'ajuster ma façon de poser des limites à ma fille : elle m'a fait savoir qu'elle a besoin que je la prévienne bien en amont des contraintes, plutôt que de les lui dire à la dernière minute. Elle a entendu mon mécontentement quand elle a fait sa crise, et j'ai entendu son besoin d'anticipation. Donc j'ai évité d'autres crises du même style à l'avenir.
S'excuser quand on s'emporte
Cela arrive à tout le monde de perdre ses nerfs et de crier, et la fatigue de la parentalité n'aide pas ! Dans l'absolu, ce n'est pas dramatique de s'emporter de temps en temps, surtout si après, on en discute avec nos enfants et on présente nos excuses.
Imaginez la situation inverse : votre enfant fait une crise de nerfs. Vous attendez de lui ou elle, au minimum, une explication et des excuses une fois que l'orage est passé. L'idée est de faire exactement la même chose quand vous vous énervez.
Il s'agit de prendre un temps calme avec notre enfant pour expliquer la raison de notre emportement sans lui faire de reproche (j'étais fatiguée, préoccupée par autre chose...), reconnaître que nous aurions dû réagir autrement et présenter nos excuses.
Pas besoin d'en faire des tonnes. Cette courte discussion permettra de remettre de la bienveillance dans cet épisode de craquage. Cela aide également l'enfant à comprendre nos émotions et nos attitudes de parents, et aussi à accepter que parfois on s'énerve mais après on se remet en question et on admet ses erreurs. Autant d'apprentissages fondamentaux pour nos enfants.
S'assurer des effets de notre éducation bienveillante
La bonne intention, c'est très bien. Les bonnes actions, c'est super.
Mais l'important est que tous ces efforts portent leurs fruits. Il est donc indispensable de vérifier régulièrement que nos enfants grandissent effectivement avec nos grands principes :
- La confiance en soi
- La conscience de ses compétences et de ses marges de progression
- La communication honnête avec nous
Il est primordial d'observer l'attitude de nos enfants, et de parler de ces sujets avec l'enfant en toute transparence pour que lui ou elles-même se situe sur ces points.
Et si l'un de ces grands pans n'est pas suffisamment ancré chez notre enfant, il est important de le remarquer suffisamment tôt pour changer notre façon de faire. Dans le cas contraire, on risque de s'épuiser à ce que l'on pense être de la bienveillance pour n'apporter que peu de bénéfices à notre enfant.
S'enquérir des besoins de notre enfant
Dès que l'enfant parle, on peut commencer à lui demander de quoi il ou elle a besoin pour se sentir plus en confiance, pour comprendre ce qu'il ou elle peut ou ne peut pas entreprendre, ou pour se sentir libre de nous parler de tout.
En général, si votre enfant sent votre ouverture d'esprit et votre aptitude à accueillir ses ressentis, il ou elle vous dira ce qui lui manque, ce qui le ou la gêne etc. Vous pourrez discuter dans le calme des points problématiques, et si vous trouvez cela pertinent, vous pourrez corriger votre façon de faire pour répondre à ses besoins.
Garder en tête la raison qui nous pousse vers l'éducation bienveillante
Si le simple fait de vous comporter avec bienveillance vous suffit, vous serez rapidement satisfaite.
Si votre objectif est de donner une sécurité émotionnelle et affective à votre enfant, il est primordial d'instaurer ces échanges pour comprendre comment assurer à votre enfant la bienveillance qu'il ou elle pourra ressentir dans les faits. Et savoir comment mettre en place cette éducation positive avec le plus d'efficacité et de simplicité possible. Pour mener cette éducation qui n'est pas de tout repos avec le plus de sérénité possible.
Reconnaître quand l'épuisement survient
Si tous vos efforts pour maintenir un climat bienveillant dans vos relations avec vos enfants vous pèsent, ou si vous sentez que vous n'êtes pas suffisamment bien dans votre tête pour assumer toute cette charge mentale, il est temps d'en prendre conscience et d'agir.
Tous les moyens sont bons pour prendre soin de vous : activité de loisir pour vous seule planifiée régulièrement, yoga, méditation... et la thérapie bien sûr.
En vous octroyant un équilibre émotionnel, vous pourrez accompagner vos enfants avec davantage de sérénité et de positivité.